Comment reconnaître la causalité?

Edmond Malinvaud. Voies de la recherche macroéconomique, Odile Jacob, 1991, ISBN 2738101135 [Chapitre 13 - Débats sur l'induction économétrique]


La macroéconomie a souvent pour objet des relations de cause à effet. Certains débats relatifs à sa méthodologie ont porté tantôt sur le sens à donner à la notion de causalité tantôt sur les moyens grâce auxquels l'existence d'une causalité pouvait être testée. Nous ne considérons pas à nouveaux les enjeux quelque peu généraux de ces débats puisque nous les avons considérés à la fin du chapitre 10. Mais il nous reste à compléter brièvement ce que nous avons dit alors.  


La causalité entre une grandeur z et une grandeur y, hypothèse introduite au moment de la spécification d'une théorie, est difficilement justiciable d'un test économétrique. C'est pourquoi les économètres lui substituent souvent une propriété voisine, mais non identique, celle de "causalité à la Granger", c'est-à-dire d'antériorité des perturbations accidentelles de la série temporelle des valeurs prises par zt sur celles prise par yt. Tel était le point où nous étions parvenus dans le chapitre 10.
Pour donner un sens à cette notion de perturbation accidentelle ou d'"innovation", il faut se référer à une forme de processus aléatoire représentatif de la genèse d'une série temporelle isolée. Sans chercher à être précis sur la portée et la signification de cette représentation, ce qui nous entraînerait beaucoup trop loin, je la pose simplement pour chacune des deux grandeurs yet zt. Il s'agit d'une formule d'autorégression [...] avec un nombre illimité de retards:

rt et st sont des coefficients fixes ; le processus des vt sont, comme celui des wt, est un « bruit blanc », c'est-à-dire une suite de variables aléatoires indépendantes, d’espérance nulle et de même loi de probabilité.
Le terme d’innovation pour vt sont (comme pour wt) s’explique par la considération suivante : si l’on connaissait les rt et si l’on avait observé toutes les valeur antérieures yt-τ, on prévoirait naturellement yt par la somme des termes du membre de droite de (1) à l’exception de vt, lequel constitue un choc, un accident essentiellement nouveau, affectant l’évolution de la série.
Dire que z cause y « à la Granger », c’est dire que les innovations w de z influencent les innovations ultérieures v de y (il y a donc une certaine corrélation entre les deux bruits blancs, concernant vt et wt). Tester cette causalité c’est savoir si l’on doit la rejeter, c'est-à-dire s’il n’y a pas de corrélations entre wt et les valeurs ultérieures de vt ou encore si :
(3)                                         E(wt vt+h) = 0,     pour tout h>0.
[…] A l’idée de causalité se rattache celle d’exogénéité. Spécifier que la grandeur zk est exogène dans un modèle où les grandeurs yi (i=1,…,n), c’est admettre qu’aucun des yi ne cause zk. […] A titre d’exemple, je peux citer les travaux de C. Sims [Princeton University] sur les Etats-Unis, travaux déjà évoqués à la fin de la première section. Cet économètre a considéré diverses autorégressions vectorielles de grandeurs concernant la production, les prix, la masse monétaire, le taux d’intérêt.   



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