Miroir et Spéculation


Keynes compare dans la « Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie » (1936), la pratique de l’investissement financier à un concours de beauté :
« Ou encore, pour varier légèrement la métaphore, la technique du placement peut être comparée à ces concours organisés par les journaux où les participants ont à choisir les six plus jolis visages parmi une centaine de photographies, le prix étant attribué à celui dont les préférences s’approchent le plus de la sélection moyenne opérée par l’ensemble des concurrents. Chaque concurrent doit donc choisir non les visages qu’il juge lui-même les plus jolis, mais ceux qu’il estime les plus propres à obtenir le suffrage des autres concurrents, lesquels examinent tous le problème sous le même angle. Il ne s’agit pas pour chacun de choisir les visages qui, autant qu’il en peut juger, sont réellement les plus jolis ni même ceux que l’opinion moyenne considérera réellement comme tels. Au troisième degré où nous sommes déjà rendus, on emploie ses facultés à découvrir l’idée que l’opinion moyenne se fera à l’avance de son propre jugement. Et il y a des personnes, croyons-nous, qui vont jusqu’au quatrième ou au cinquième degré ou plus loin encore. ».

 La spéculation c’est en quelque sorte la possibilité de voir les choses “à la fois pour soi-même et en se mettant à la place d'autrui : c’est observer l’activité humaine à travers un miroir. 

Selon le « Gaffiot » (dictionnaire latin-français – Hachette (1934)), speculum signifie : 1. Miroir, 2. Reproduction fidèle, image.




Le speculator quant à lui est : 1. Un observateur, espion – [mil] pluriel : éclaireurs – mais aussi le messager, courrier, garde du corps auprès du général  2. Observateur des phénomènes chez Cicéron.
 Pour le philosophe Merleau-Ponty (L’Œil et l’Esprit – Gallimard 1964), le miroir est « l’instrument d’une universelle magie qui change les choses en spectacles, les spectacles en choses, moi en autrui et autrui en moi. Les peintres ont souvent rêvé sur les miroirs parce que, sous ce « truc mécanique » comme sous celui de la perspective, ils reconnaissaient la métamorphose du voyant et du visible, qui est la définition de notre chair et celle de leur vocation.»



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