Politique monétaire, inflation, chômage : la règle de Taylor


Pendant la crise financière de 2008, plusieurs banques centrales dont la Banque Centrale Européenne (BCE), ont réduit leurs taux directeurs à des niveaux historiquement bas pour faire face à la détérioration des conditions économiques, l’augmentation du chômage et les disfonctionnements des marchés financiers.
Lors de sa réunion d’avril 2011, la BCE annoncé le premier relèvement de son taux directeur de 0.25 points (25 points de base) pour le ramener à 1.25%. La banque centrale américaine (FED) garde quant à elle son taux directeur à son seul plancher de 0.25%. Comment expliquer cet écart ?

La règle de Taylor

John Taylor, professeur d’économie à l’université de Stanford, membre de la prestigieuse Hoover Institution et ancien sous-secrétaire au Trésor chargé des affaires internationales de 2001 à 2005, a montré dans son livre Macroeconomic Policy in a Word Economy : from econometric design to practical operation(*) (1993 - New York : W. W. Norton Company), que la politique de détermination des taux directeurs par les banques centrales pouvaient être modélisée par une relation affine du type :

Taux directeur = 1% + 1.5 x Inflation – 1 x Ecart de Chômage,

où l’écart de chômage est la différence entre le taux de chômage courant et le taux de chômage n’accélérant pas l’inflation (NAIRU, taux de chômage d’équilibre).

La règle de Taylor répond ainsi à un double objectif : d'une part suivre les augmentations de l’inflation pour la contenir et d'autre part favoriser l’investissement et la croissance lorsque l’écart de chômage devient trop important.

Depuis la crise l’écart de chômage a fortement augmenté notamment aux Etats-Unis ; à tel point que la règle de Taylor préconisait un taux directeur négatif ! Etant limité par le seuil intrinsèque de la positivité des taux d’intérêts nominaux, la FED s’est alors retrouvée avec une « pédale d’accélération au plancher et a ainsi perdu son levier d’action directe sur l’économie réelle » ; c’est pourquoi elle s’est alors orienté vers un autre levier moins conventionnel : le quantitative easing.

L’inflation ayant suivi des évolutions similaires aux Etats-Unis et en Europe depuis la crise, cette remontée du taux directeur par la BCE s’interprète principalement comme une réduction plus rapide en Europe de l’écart de chômage (Figure 1).

Source: la lettre économique de Fernanda Nechio, économiste à la Federal Reserve Bank de San Francisco, Monetary Policy When One Size Does Not Fit All (**), FRBSF Economic Letter, June 13, 2011.

Le cas particulier de l’Europe

L’exercice devient alors difficile lorsqu’il s’agit de trouver une trajectoire monétaire optimale pour accompagner des pays pour lesquels l’inflation et l’écart de chômage sont très différents (Figure 2).

Pour se doter de tous les moyens d'action et assurer aux européens la sécurité économique attendue, les états européens devront poursuivre l’effort d’intégration culturelle et politique de l’Europe, qui elle-même permettra plus de mobilité des européens d’un état à l’autre.

Le chemin est encore long et les tentations du repli sur soi fortes en période électorale.

La crise actuelle peut aussi mettre les européens au pied du mur et les forcer à franchir de nouvelles étapes dans la consolidation d’une zone économique et culturelle plus soudée.

(*) Politique macroéconomique dans une économie mondiale : de la conception économétrique à la mise en œuvre pratique.
(**) Politique monétaire : lorsque le modèle taille unique ne convient pas à tous.

Comments

Anonymous said…
Clair synthétique précis.merci mille fois!

Popular Posts