Réflexions autour de “L’autre Dieu: la plainte, la menace et la grâce” de Marion Muller-Colard

 

DALL·E 2023-12-23 15.08.57 - A painting in the style of Eugene Delacroix, depicting Job from the Bible complaining to his friends

Autour du livre de Marion Muller-Colard.


Pour Marion Muller-Colard, parler d’un autre Dieu passe par une remise en question de représentations d’un Dieu rétributif qui récompense les gentils et punit les méchants. Cette image d’un Dieu transactionnel, elle ne tient pas: elle ne résiste pas aux grands malheurs de nos vies, de notre temps.


Cet autre Dieu, c’est Job dans son livre, qui nous met sur sa piste; ce texte fondateur pose en effet très tôt le paradoxe du “juste souffrant”. Marie Muller-Colard dans une écriture limpide nous annonce qu’un autre Dieu est possible: un Dieu qui devient “promoteur” et “prometteur” du “courage d'être”.


La Plainte


L’histoire de Job, c’est celle d’une plainte profonde qui nous interroge sur le sens de l’existence, une plainte qui, en réponse à une transformation souvent subie, devient l’expression d’un deuil de soi-même, celui que j'étais et que je ne peux plus être. Il s’agit alors d’accueillir cette plainte sans  aucune forme de pansement qu’il soit religieux ou séculier (on peut penser ici à la pensée positive qui rejette les émotions considérées comme négatives comme la colère - sur ce sujet voir également Le visage de nos colères de Sophie Galabru).


La Menace


La menace est à intégrer dans la foi, une foi qui ne peut pas être un bouclier protecteur. Pour la théologienne protestante, la foi ne se situe pas à un endroit de la protection. Un Dieu qui protégerait plus certains que d’autres ne pourrait pas tenir d’un point de vue théologique. La relation à Dieu, la prière, se tourne vers le courage d'être et d’une certaine manière passe par un renoncement à la théologie pour “entrer dans la grâce”.  


La Grâce


Qu’est-ce que la grâce? La grâce ne relève pas de la réflexion intellectuelle. Certes la théologie, à travers notamment l'étude de nos représentations de Dieu, éclaire l'humanité. Elle dit beaucoup de l’homme et en cela elle est indispensable. En revanche, dans la grâce je peux créer une relation à la transcendance sans rien comprendre à la théologie. Pour Marion Muller-Colard, la grâce “c’est simplement le sentiment qu’il est juste et bon que le monde soit et que j’en fasse partie”. C’est essentiellement la réponse de Dieu à Job. Cette grâce devient alors le point de départ d’une foi minimaliste, une foi parcimonieuse qui nous dit que nous traversons tous de l’inconsolable, de l’injustifiable et que néanmoins nous faisons le choix de “faire confiance”: “à Dieu dans son élan de création” pour les croyants  et/ou simplement dans l’exigence qui nous est faite de protéger la dignité humaine.


Marion Muller-Colard ne se retrouve-t-elle pas très proche des existentialistes dans cette grâce qui devient “courage d'être”?


La thématique du "courage d'être" dans le livre L'Autre Dieu de Marion Muller-Colard présente effectivement des similitudes avec les idées existentialistes.


Le Courage d'Être Face à l'Absurde: 

L'existentialisme, notamment chez Sartre et Camus, insiste sur la nécessité de faire face à l'absurdité de la vie et de trouver un sens personnel malgré l'absence de sens inhérent dans l'univers. Muller-Colard, en explorant l'idée de "L'Autre Dieu", semble également aborder le concept de trouver la foi ou la compréhension dans un monde où les réponses traditionnelles ne suffisent plus.


L'Authenticité et la Responsabilité Personnelle: 

Les existentialistes valorisent l'authenticité et la responsabilité personnelle, des concepts qui peuvent être reflétés dans "L'Autre Dieu" lorsqu'il s'agit de reconnaître et d'embrasser un chemin de foi qui n'est pas dicté par des dogmes rigides mais par une recherche personnelle et authentique de la vérité.


La Liberté et la Foi: 

L'existentialisme met l'accent sur la liberté individuelle et le choix. Muller-Colard explore des idées similaires sous l'angle de la foi, où le croyant doit faire le choix personnel et courageux de croire et de pratiquer sa foi d'une manière qui n'est pas nécessairement conforme aux normes établies.


Le Défi de la Souffrance et du Mal: 

Tout comme les existentialistes s'interrogent sur comment vivre une vie significative dans un monde souvent indifférent ou hostile, Muller-Colard peut aborder la question de la foi et du divin dans un monde où la souffrance et l'injustice existent, défiant ainsi les conceptions traditionnelles de la toute-puissance et de la bonté divines.


En somme, les deux “cadres de pensée” partagent une exploration du courage, de la responsabilité personnelle, et de la recherche de sens dans un monde complexe et souvent déroutant. 


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